Dave était assis sur son lit, les mains tremblantes, le souffle coupé, les lèvres mordues jusqu’au sang. Il tremblait littéralement comme une feuille.

Il va mourir.

—Je vais mourir. Je vais mourir. Je vais mourir , répétait-il depuis quelques instants.

Dave n’était ni clairvoyant, ni superstitieux. Mais aujourd’hui, ou demain, il allait mourir. C’était une évidence. Il le sentait. La mort planait autour de lui, invisible mais lourde.

Les regrets l’écrasaient.

Je m’en veux. J’ai peur.

Comme tout être humain, il avait peur. Peur de mourir. Peur de n’avoir rien accompli. Peur de disparaître dans l’anonymat.

Il se leva, marcha de long en large, observant la vue par la fenêtre.

C’est la dernière fois.

Hier, il était allé au café de Lily.

C’était aussi la dernière fois.

Il sanglotait, tentant d’étouffer les bruits de sa gorge nouée.

Dans un coin de la chambre, vide, il murmura :

—Est-ce que je veux mourir ici, ou au bord de la plage ? Ce serait mieux au bord de la plage…

Alors il se leva, enfila lentement son manteau préféré.

—C’est la dernière fois que je te mets… À l’autopsie , ils te retireront. Et au funérail, si j’ai encore des gens qui tiennent à moi, ils me mettront une autre tenue.

Il hésita devant son sac, le prit, le reposa aussitôt.

À quoi bon ? Je ne compte plus revenir.

Il saisit son téléphone.

—Peut-être devrais-je envoyer un message à Lily. Elle a toujours été si gentille…

Mais il reposa l’appareil.

Non.

Alors, il prit une feuille et un stylo, et écrivit :

Ma chère Lily,

Voilà trois ans que nous nous connaissons. Je n’ai jamais eu le courage de t’avouer ce que je pensais de toi. Tu as été le soleil de mes trois ans d’obscurité, la lune quand le soleil refusait d’éclairer ma vie.

Tu es une personne extraordinaire. On ne choisit pas sa famille, mais on choisit ses amis. Si je pouvais réécrire ma vie, je t’aurais rencontrée plus tôt. Peut-être que je n’en serais pas là.

Lily, ne change jamais. Tu es un ange parmi les démons, la preuve que la bonté existe vraiment.

Je dois aussi t’avouer une chose : je déteste le café. Mais je venais au tien, encore et encore, simplement pour te voir. Ton sourire avait plus de goût que toutes les boissons.

Merci pour ces trois années. J’espère que, là où je vais, nos chemins se croiseront encore. Je te souhaite une vie lumineuse, que tous tes rêves se réalisent, même si les miens se sont brisés parce qu’ils étaient trop grands.

Au revoir, Lily.

Une toux le secoua. Sa main se porta à ses lèvres et revint tachée de rouge. Il fronça les sourcils, essuya ses doigts sur son pantalon, puis reprit la plume, refusant d’accorder plus d’importance à ce signe.

Les larmes tombaient sur le papier, une à une. Chaque mot avait été choisi avec soin. Dave voulait que Lily ne se sente jamais coupable en lisant cette lettre. Il plia délicatement la feuille, la posa sous un verre.

Puis il remit son manteau. En relevant le col, il sentit ce goût métallique revenir. Il cracha dans un mouchoir : rouge. D’un geste brusque, il effaça la trace, comme pour nier la vérité.

—Non, ce n’est pas le moment de pleurer. On doit rester fort jusqu’au bout.

Il ouvrit la porte, tourna les talons. Dehors, quelque part, l’attendait la plage. Une destination que tout le monde associait à la joie.